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filozof u kabanici

Stvarno me raznježio tekst omiljenog mi filozofa Jacquesa Rancierea o Foucaultu. Žalim one koje ne znaju francuski, ali obecajem da cu s vremenom prevoditi dio po dio.... Za poèetak, evo dva temeljna ulomka:


"...Spoznaja disciplinarnog sistema ne pothranjuje svijest na pobunu. Ona samo ponovno opisuje teritorij u kojem mreža uzroka prvoga može susresti pobude za drugo. Sam taj susret pretpostavlja raskorak kojeg obuzima, i kojeg ne iscrpljuje, 'subjektivni' osjeæaj. "Situacija u zatvorima je nepodnošljiva!", kaže Foucault. Sama ta uporaba glagola biti nesvodiva je na one u kojima znanost razlikuje pozitivnosti i pripisuje vlastitosti. Ono što nas je nauèila materijalistièka povijest uvjeta našeg mišljenja i djelovanja nije ni nužnost poretka stvari ni sloboda subjekta veæ intervalu izmeðu to dvoje, intervalu kojeg ispunjavaju samo osjeæaji, poput "nepodnošljivosti", koji ne prevode nikakvu nužnost niti upuæuju na slobodu koja znaèi samo moguænost djelovanja, a ne vladanje sobom. Izmeðu spoznaje i djelovanja filozofija ne utemeljuju nikakvu dedukciju. Ona samo otvara interval u kojem nam je dopušteno rasklimati orjentacijske oznake i izvjesnosti na koje se oslanjaju dominacije....Bio je tog jutra ondje - na praznicima doduše, ali tko to nije u to doba - inkognito, bez megafona, ali u kabanici. Ta kabanica nije imala veze s meteorologijom veæ samo s mlazovima vode kojim su gaðali štrajkaše Citroena koje je došao podržati, a koji su prihvatili 'autonomaše' u pritiskanju policijskih odreda. Bio je ondje bez potrebe, ne zbog doprinosa u borbi spoznaje znastvenika i glasu filozofa, veæ obrnuto, da grabi velikim koracima podruèjem tajnovite solidarnosti u kojem mišljenje nalazi svoje predmete i zadatke."



Les philosophes sans porte-voix
Par Jacques RANCIERE, philosophe et historien

samedi 19 juin 2004 (Liberation - 06:00)

Que faire de Foucault aujourd'hui ? Les uns se querellent sans fin : son analyse des illusions de la libération sexuelle en fait-elle l'initiateur de la révolution queer ou le dénonciateur anticipé des mariages gays ? Ses thèses sur la société disciplinaire n'en font-elles pas le précurseur des penseurs patronaux qui partent à l'assaut de la Sécurité sociale en chantant les beautés morales du risque, opposées aux turpitudes de la société assistée ? Certains pensent trouver dans son analyse du biopouvoir l'ontologie de la vie propre à fonder le mouvement des multitudes.

D'autres y voient théorisé cet état d'exception qui fait de la modernité un vaste camp de concentration. D'autres encore suivent patiemment, d'interview en interview, les linéaments de l'éthique de l'individu sur laquelle ne pouvaient manquer de déboucher ses analyses du souci de soi chez Socrate ou Sénèque. Les philosophes ne sont-ils pas là pour nous enseigner les principes de la transformation du monde ou ceux de notre propre perfectionnement ?

Il se peut pourtant que le legs essentiel de Foucault soit d'avoir ébranlé cette image simpliste des rapports de la pensée et de la vie. Tout son parcours n'a-t-il pas été placé sous le signe de l'écart et du contretemps ? Qu'était-ce d'abord que cette manière de faire de la philosophie en racontant des histoires sur la prison ou l'hôpital il y a deux cents ans au lieu d'élaborer un clair discours sur ce que l'être est vraiment et ce qui l'oppose au non-être ? Pas étonnant, disait-on, que cette entreprise d'antiquaire débouche sur une nouvelle forme de déterminisme historique, décourageant toute volonté de transformation du monde, en montrant que les sujets ne peuvent pas penser autre chose que ce qu'ils pensent.

Deux ans plus tard, changement de décor : il suffisait de prendre les choses à l'envers. Celui qui avait analysé l'enfermement de la folie et la constitution du pouvoir médical n'était-il pas naturellement à sa place, à l'avant-garde d'un mouvement qui s'en prenait non plus simplement à l'exploitation économique et à l'Etat mais à l'ensemble des relations de domination disséminées dans le corps social ? L'historien de l'enfermement n'est-il pas le mieux placé pour fonder un groupe d'information militant sur les prisons ? Une image s'imposa alors : celle du philosophe dans la rue, armé du porte-voix qui fait de la connaissance de l'oppression le moyen de mener la lutte contre l'oppression.

Mais les écarts ne se réduisent pas, les contretemps ne se transforment pas en coïncidences heureuses. La connaissance du système disciplinaire ne fournit pas sa conscience à la révolte. Elle redessine simplement le territoire sur lequel le réseau des raisons de l'une peut rencontrer celui de l'autre. La rencontre même suppose cet écart que seul occupe, sans le combler, un sentiment «subjectif» : «La situation dans les prisons est intolérable», dit Foucault. Cet usage du verbe être est irréductible à ceux par lesquels la science discerne des positivités et attribue des propriétés. Ce que l'histoire matérialiste des conditions de notre pensée et de notre action nous enseigne, ce n'est ni la nécessité de l'ordre des choses ni la liberté des sujets. C'est l'intervalle entre les deux, intervalle que seuls remplissent des sentiments comme l'«intolérable» qui ne traduisent aucune nécessité et indiquent une liberté qui est simple capacité d'agir, et non maîtrise de soi. Entre la connaissance et l'action, la philosophie ne fonde aucune déduction. Elle ouvre seulement un intervalle où il nous est loisible de faire vaciller les repères et les certitudes sur lesquels s'appuient les dominations.

A l'image convenue je préfère donc ma première rencontre avec le «philosophe dans la rue». C'était en juin 1968. A en croire les sérieux biographes qu'il a quelquefois égarés, il était, pendant tout ce temps, loin de Paris et de ses agitations. Il y était pourtant ce matin-là ; en vacances, il est vrai, mais qui ne l'était alors ? Incognito et sans porte-voix, mais avec un imperméable. Rien à voir avec la météorologie, seulement avec les jets d'eau avec lesquels les grévistes de Citroën, qu'il venait renforcer, accueillaient les «autonomes» qui voulaient forcer le piquet. Il était là sans nécessité, non point pour apporter à la lutte la connaissance du savant et la voix du philosophe, mais pour arpenter, à l'inverse, le territoire des solidarités énigmatiques où la pensée trouve ses objets et ses tâches.

Loin de toutes les rationalisations rétrospectives, c'est cette énigme qu'il vaut la peine d'approfondir.



Post je objavljen 15.10.2004. u 16:06 sati.